Stan Getz (1927-1991) est considéré comme l’un des plus grands joueurs de saxophone ténor. Sa sonorité feutrée, lissée, douce et aérienne, la fraîcheur de son invention mélodique en firent le premier des “Brothers”, ces jeunes saxophonistes blancs qui, au lendemain de la guerre, vouaient un culte exclusif au grand Lester Young. Par la suite, Stan Getz sut évoluer sans renier son style, vers une expression plus universelle, alliant la tendresse à la véhémence. Avec cet album sorti en 1963, la Bossa Nova fit de Geatz une vedette universelle. Il faut convenir que sa sonorité et le charme de son discours mélodique s’accordent à merveille aux rythmes brésiliens, surtout lorsque se joignent à lui Jao Gilberto, guitariste et chanteur, le pianiste Atonio Carlos Jobim, et la soeur de ce dernier, la vocaliste Astrud. Pour The girl of Ipanema, Desafinado, Coronado, Se danco Samba…
La Bossa-Nova et João Gilberto :
La bossa nova est née à Rio de Janeiro, alors capitale du Brésil, durant une période de croissance économique et de stabilité politique où l’optimisme était de mise. Elle fut inventée à la fin des années 1950 par un groupe composé principalement du compositeur Antônio Carlos Jobim (également connu sous le nom artistique de Tom Jobim), du chanteur et guitariste João Gilberto, et du poète Vinícius de Moraes. Elle est la réponse aux attentes musicales des jeunes des classes moyennes de Rio de Janeiro. Ceux-ci sont à la recherche de modernité, d’une nouvelle manière d’interpréter les chansons, d’une musique plus épurée, de paroles optimistes qui reflètent leurs aspirations. Ils apprécient la musique nord-américaine, en particulier les disques de Frank Sinatra. Ils rejettent les formes musicales brésiliennes traditionnelles telles que les sambas de type carnaval avec une utilisation massive des percussions et les samba-canção, similaires aux boléros hispano-américains, offrant des compositions simples, une harmonie standard, des voix douces et des textes sentimentaux, fréquemment mélodramatiques.
Les musiciens de bossa nova font partie de la classe moyenne de Rio qui fréquente les clubs de jazz et est influencée par la musique et le cinéma nord-américains. Les paroles des chansons de la bossa nova traitent de thèmes légers comme l’amour, les plages de Rio, ou la beauté des femmes brésiliennes.
L’impact de la bossa nova sur la musique mondiale ne s’arrête pas seulement à un nouveau genre musical. La bossa nova a influencé durablement le jazz, la musique populaire nord-américaine, la chanson européenne et la musique de film.
De la Bossa Nova à la Musique Populaire Brésilienne :
Au moment où le coup d’État de 1964 instaure la dictature militaire, la Bossa Nova stricto sensu prend fin au Brésil. Une nouvelle génération d’artistes brésiliens, surnommée la «seconde génération de la bossa nova», et dont font partie des artistes tels que Edu Lobo, Maria Bethânia, Gilberto Gil, Caetano Veloso et Chico Buarque, œuvre à transformer la bossa nova pour qu’elle soit plus en phase avec la réalité politique et sociale du Brésil et qu’elle incorpore d’autres styles musicaux populaires brésiliens comme la Samba de Bahia, le Choro ou la Modinha. Plusieurs créateurs historiques de la Bossa Nova, à l’instar de Carlos Lyra et de Vinícius de Moraes, rejoignent ce mouvement qui prend le nom de MPB (« Musique Populaire Brésilienne »).
Getz/Gilberto : fut enregistré en 1963 par le saxophoniste américain Stan Getz et le guitariste et chanteur brésilien João Gilberto, avec la participation du pianiste et compositeur Antônio Carlos Jobim. Il sort après Jazz Samba et Jazz samba Encore de Stan Getz. Il a connu un grand succès international particulièrement aux États-Unis. Les morceaux The Girl from Ipanema et Corcovado chantés par Astrud Gilberto sont devenus des standards du jazz. L’album a remporté le Grammy Award du meilleur album en 1965, et The Girl from Ipanema le prix du meilleur enregistrement de l’année.
Il a été enregistré les 18 et 19 mars 1963 à New York par l’ingénieur du son Phil Ramone et produit par Creed Taylor sur le label Verve Records. Antonio Carlos Jobim enregistre peu de temps après et sur le même label The composer of Desafinado, plays. Un second album Getz/Gilberto vol.2 paraît en 1966.
En 2015, à l’occasion du Record Store Day, paraît l’album Selections from Getz/Gilberto 76 qui contient quatre pistes inédites tirées d’un concert enregistré à San Francisco en 1976 et réunissant les deux artistes éponymes. Le magazine Rolling Stone le place en 2012 en 447e position de son classement des 500 plus grands albums de tous les temps. Il est également cité dans l’ouvrage de référence de Robert Dimery Les 1001 albums qu’il faut avoir écoutés dans sa vie.
Voir sur YouTube : Stan Getz feat. Astrud Gilberto – The Girl From Ipanema (Official Video)
Au début des années 60, Jaguar chassait sur les terres de Bentley ou d’Aston Martin, mais avec moins de liberté : ses rivales étaient construites sans considération de prix, alors que pour le constructeur de Coventry, le tarif était une donnée importante. Le cuir et le noyer ronceux devaient se payer d’une façon ou d’une autre, c’est pourquoi chez Jaguar, le raffinement pouvait très bien cohabiter avec des pièces bon marché, rentabilité oblige. Un bon exemple était la suspension arrière de l’élégante berline, équipée de ressorts à lame en porte-à-faux, un système d’amortisseurs largement dépassé. Il fut avantageusement échangé deux ans plus tard contre celui de la type E, avec freins suspendus et roues indépendantes. Malheureusement, pour l’installer, il fallut redessiner le coffre, et le modèle, devenu le type S, suscita de nombreuses critiques esthétiques.
Cependant, ce félin était une berline sportive de haut niveau qui frisait les 200 km/h, dotée de puissantes accélérations, d’un bon freinage et d’un six cylindres onctueux et agréable. La boîte de vitesse n’était cependant pas un modèle de vertu. Malgré les nombreux reproches qu’on fit d’elle à sa sortie, la MKII eut beaucoup de succès par la suite, et actuellement, elle est devenue un grand classique. Très prisée en compétition (catégorie tourisme), la MKII a notamment remporté le Tour de France automobile à quatre reprises consécutives entre les mains de Bernard Consten.
La Mark II : existait en trois cylindrées : 2.4, 3.4 et 3,8 litres, avec des transmissions manuelles, avec ou sans overdrive, ou automatiques, surtout pour les États-Unis.
La version 2.4 était une honnête berline sans prétentions avec une certaine mollesse ce qui n’était plus le cas avec la 3.4. La 3.8 qui était la plus sportive, a couru et gagné de nombreux rallyes dont le Tour de France auto. Elle s’est illustrée aussi dans le Monte-Carlo, mais sans le gagner.
En 1963, Jaguar décida d’introduire une nouvelle variante luxueuse de sa berline phare la MKII, utilisant aussi le moteur XK qui venait prendre une place entre la petite MKII et la grosse MKX.
La Mark II S-Type : était proposée en deux versions 3,4 et 3,8 litres. Une version 2.4 ne cadrait pas avec l’image luxueuse de la voiture.
En fait ce fut plus un nouveau modèle qu’une évolution. La caisse est totalement différente. Modifiée à l’avant avec une calandre spécifique, des phares surmontés de petites visières et des pare-chocs minces. L’arrière ressemblait à celui de la MKX posée sur une suspension indépendante qui donnait une conduite améliorée et plus confortable.
La plupart des acheteurs optèrent pour la version 3.8 la plus puissante quoique la 3.4 n’ait pas été sous motorisée. Moins rapide que la MKII puisque 200 kg plus lourde, la tenue de route était cependant reconnue meilleure et très efficace grâce à sa nouvelle suspension arrière indépendante qui était la même en plus large que celle des Type E. Les boiseries étaient beaucoup plus belles et les cuirs Connolly mieux finis.
1963 vit la naissance de la Quattroporte. La première 4 portes construite par Maserati était caractérisée par une ligne classique due à Frua, mais aussi un aménagement intérieur et une finition impeccables. La genèse de la Quattroporte remonte à une commande du Shah d’Iran passée à Maserati. Pour le Shah, l’ingénieur Alfieri dériva un moteur routier du V8 de la 450S de compétition. Monté dans le coupé dit “Shah d’Iran” réalisé à trois unités seulement, ce V8 se retrouva bientôt sous le capot de la 5000 GT, un autre coupé 2 portes présenté au Salon de Turin 1959 et qui sera construit à 31 exemplaires. L’expérience acquise et l’absence de toute berline italienne de prestige décidèrent Maserati à lancer la Quattroporte Tipo 107.
Première génération (1963-71) (Tipo 107 & Tipo 107/A) :
Pour loger quatre ou cinq personnes, l’équipe d’Alfieri dut dessiner un nouveau châssis ou plutôt une structure mixte, mi-coque, mi-châssis à l’avant, avec suspensions arrière à essieu De-Dion. La caisse, dessinée par Frua, était construite chez Vignale. Côté moteur, il y eut révision à la baisse par rapport aux 5 litres et 340 chevaux de la 5000 GT : la Quattroporte dut se contenter d’un peu plus de 4,1 litres et 260 chevaux lors de son lancement au Salon de Turin d’octobre 1963.
La Quattroporte Tipo 107 fut remplacée en 1969 par la 107/A à essieu arrière rigide et moteur 4,7 litres de 290 chevaux. Elle est reconnaissable à ses phares avant : 2 paires de projecteurs jumelés au lieu des simples optiques rectangulaires de la première série. La dernière 107/A fut construite en 1971 et la production totale des deux versons fut de 679 unités.
Deuxième génération (1971-79) (AM121 & AM123) :
Maserati vient à cette époque d’être racheté par Citroën. La Quattroporte II eut une gestation très laborieuse en raison de l’influence de responsables Citroën sur la direction de l’entreprise. Un premier projet est resté à l’état de prototype chez les designer Frua et Bertone. La seconde version de la Quattroporte sera présentée en 1973 et sera la dernière automobile Maserati de la période très mouvementée laissée après la gestion Citroën. Le dessin de la voiture porte la griffe du célèbre carrossier Bertone et plus précisément de son designer en chef Marcello Gandini. Elle sera équipée d’un moteur Maserati V6 de 3 litres, le même qui équipera entre autres les Maserati Merak et Citroën SM. Il aura bien de la peine à donner à la voiture le caractère sportif attendu par les clients habituels de la marque. De plus; ce modèle sera doté de la traction avant, d’un gabarit très imposant mais ne connaîtra pas le succès que sa ligne aurait pu laisser envisager ; elle tombait en pleine crise pétrolière, et une vraie GT de marque ne peut être une traction avant. La voiture recevra aussi les suspensions hydrauliques de la SM ainsi que d’autres attributs plus modestes dans l’habitacle.
La Maserati Quattroporte 2ème série ne sera construite qu’en 13 exemplaires entre 1974 et 1975, en raison du placement en redressement judiciaire de la marque par Citroën. Cette voiture avait été conçue pour concurrencer les Fiat 130, Jaguar XJ6, BMW 2800 et autres Mercedes 280 au lendemain de la crise pétrolière, mais son poids de 1,6 tonne et surtout ses dimensions imposantes (empattement de 3,07 m) étaient beaucoup trop importants pour le petit moteur V6 que Citroën s’entêta à maintenir. Ce n’est qu’au printemps 1975, lors du salon de Genève, que la version enfin équipée d’un moteur digne de la voiture, un 3,2 litres développant 200 ch, voit le jour mais il était trop tard pour retrouver une clientèle exigeante, passée à la concurrence.
Troisième génération (1979-85) (AM330 & AM337) :
Dessinée par la designer Giorgetto Giugiaro, cette Maserati se caractérise, comme toutes les voitures italiennes de cette époque, par des lignes très tendues. C’est la première automobile conçue pendant la période De Tomaso, avec pour code projet usine le «330». Sa motorisation reprend un moteur Maserati V8 en deux cylindrées : 4136 cm3 et 260 ch ou 4930 cm3 et 290 ch, ainsi que la propulsion arrière. Elle a été fabriquée jusqu’en 1990 en 2141 exemplaires.
Une version spéciale baptisée « Royale » apparait en 1986, construite à 51 exemplaires. Elle fut la voiture officielle du Président de la République italienne Sandro Pertini. Elle fut blindée comme celles destinées aux Présidents du Sénat et du Conseil italien.
Quatrième génération (1985-2001) (M139) :
Cette Quattroporte IV était la version à quatre portes des Maserati Ghibli II. Motorisée par un 2 litres, un 2,8 litres ou un 3,2 litres, elle reprendra les bases mécaniques des modèles précédents. Les blocs moteurs V6 proviendront des Maserati Ghibli II GT en versions moins puissantes, quant au moteur V8, il s’agira d’une version dérivée de celui de la Maserati Shamal, le vilebrequin plat étant remplacé par un vilebrequin en croix, au fonctionnement plus doux.
Quattroporte IV Evoluzione : En 1998, après la reprise de la marque par le groupe Fiat Auto, elle prendra le label Evoluzione. Cette version sera le premier signe de la nouvelle direction de la marque qui passera sous la direction opérationnelle de Ferrari. Ce modèle intègre les 400 points d’amélioration que l’équipe Ferrari, nouvel actionnaire de la marque, impose à la fabrication des Maserati Quattroporte. La célèbre montre, qui ornait jusqu’à présent le tableau de bord sur les modèles de la marque au trident, disparaît pour être remplacée par un afficheur numérique des plus ordinaires.
Cinquième génération (2001-2013) (M156) :
Cette génération de Quattroporte a été présentée au salon de l’automobile de Francfort 2003. Dessinée par le maître Pininfarina, elle comporte trois modèles : base, Executive GT et Sport GT. Les trois variantes sont équipées du même moteur V8 (F136) de 4244 cm3 de cylindrée d’origine Ferrari, développant une puissance de 400 ch. La version restylée de la Quattroporte V (2008) reçoit quant à elle le même 4,2 litres (développant désormais 405 ch) que la 1re version, mais une évolution portée à 4,7 litres, développant 440 ch sur la S et la GTS. Elle permet de très bonnes accélérations : 0 à 100 km/h en 5,8 secondes. pour la 4.2, 5,4 secondes. pour la S et 5,1 secondes. pour la GT S, des reprises de 70 à 120 km/h en 4,4 secondes pour la 4,2 litres, 4,7 secondes pour la S et la GTS. Des prestations qui nécessitent environ 17,3 litres aux 100 km.
Sixième génération : Depuis 2013 :
Cette dernière génération de Quattroporte a été présentée officiellement en novembre 2012. Elle sera commercialisée lors du salon de l’Automobile de Détroit 2013, donc en janvier. Pour l’été 2016, la Quattroporte sera restylée, avec une carrosserie entièrement en aluminium. Dessinée par le chef du style du groupe Fiat, Lorenzo Ramaciotti, un ancien styliste de Pininfarina, elle se décline en trois versions : V6 410 ch – propulsion classique, V6 410 ch – 4×4, V8 530 ch – propulsion classique, V8 580 ch – propulsion classique. Les moteurs, tous deux d’origine Ferrari, sont entièrement en aluminium. La Quattroporte 6 fut restylée courant 2016. Elle possède une calandre à barrettes chromées, proche de celle de la Maserati Levante, et un nouveau bouclier, ce qui lui permet aussi de s’enrichir de deux nouvelles finitions : GranLusso et GranSport.
Si certains meubles anciens n’ont plus la cote, il en est tout autrement des meubles vintage. Je ne parlerai pas ici du mobilier art déco de qualité qui est très cher mais plutôt des meubles populaires plus récents qui sont revenus à la mode tout en gardant un prix relativement abordable. Prenez l’ancienne table de cuisine en Formica jaune (et ses chaises) acquise par nos parents dans les années 70, certes elle faisait cheap avec ses couleurs criardes et son ossature métallique tubulaire fragile ; pourtant, si dans les années 80 à 90 elle ne valait pas grand chose même en bon état, elle est maintenant de plus en plus plébiscitée pour faire une déco d’intérieur branchée et s’affiche à la vente à des prix surprenants qui ne cessent d’augmenter. Par contre, essayez de vendre la superbe commode Henri II en bois massif de votre grand-mère ; ce sera comme pour le vieux piano désaccordé trônant dans le hall d’entrée, les brocanteurs vous diront à l’unanimité qu’elle ne vaut plus un kopeck car elle est lourde, encombrante et passée de mode.
Le mobilier a toujours témoigné du mode de vie d’une société. Par exemple, les sièges style Louis XV, reflet de la préciosité et de la féminité du XVIIIe siècle, étaient réservés à une élite pour laquelle l’étiquette de la cour imposait une certaine tenue. À l’inverse, le mobilier contemporain (comme celui d’Ikea que j’évoquerai plus loin) largement diffusé, conçu par des designers, renvoie à une société plus démocratique et libre. Les meubles ainsi conçus s’adaptent à notre environnement, ils sont légers, parfois recyclables, de couleurs assorties. On peut s’avachir dans les poufs face à une table basse. Les artistes designers s’inspirent de leur environnement, et face au développement de la société de consommation, l’intérêt pour le mobilier est légitime.
Les deux marques que je vais évoquer dans cet article sont célèbres bien que l’une d’entre elles ait disparu. Prisunic n’évoque pas dans un premier temps le mobilier mais est plutôt emblématique de la société de consommation de la France née des Trente Glorieuses ; cette enseigne qui est encore présente dans la mémoire collective des français fit incursion dans le monde du meuble design de 1968 à 1977 à travers son célèbre catalogue du même nom ; elle a disparu depuis 2003. Ikea, la célèbre enseigne suédoise, symbolise à elle seule le mobilier scandinave depuis plus de cinquante ans et ne démérite pas de nos jours.
Prisunic (1931-2003) :
À la fin de l’année 1931, Pierre Laguionie, actionnaire majoritaire des grands magasins du Printemps implantés à Paris, décide de créer la chaîne de magasins Prisunic afin de concurrencer la chaîne de magasins Uniprix, créée quelques années auparavant par un concurrent.
Le but de Prisunic est de proposer une gamme de “prix bon marché pour des produits d’usage courant non alimentaires pour l’essentiel, avec de l’épicerie, des confiseries et quelques produits frais”. Dès son lancement l’enseigne connait un grand succès populaire. Le succès des premiers magasins entraîne la création de l’affiliation, ancêtre de la franchise commerciale. Le commerçant affilié bénéficie du nom et des services de la centrale d’achat grâce à la SAPAC, créée en 1934.
En 1958, la styliste Andrée Putman devient directrice artistique de Prisunic. Au début des années 1960, aidée de Denise Fayolle, l’enseigne va populariser le prêt-à-porter naissant alors en France. En 1965, Jean-Pierre Bailly dessine le nouveau logotype de Prisunic : une cible fleurie en son centre.
La vente de meubles par correspondance (1968-77) :
Les magasins Prisunic, en raison du nombre de leurs points de vente (400 dans le monde, environ 300 en France) et de l’importance de leur clientèle, devaient pouvoir vendre des meubles. Mais ces mêmes points de vente ne pouvaient réserver aux meubles la surface nécessaire à leur exposition. En 1968, Francis Bruguière trouva une solution toute simple : établir un catalogue, mis à la disposition des acheteurs sur les lieux mêmes de la vente. Le catalogue est conçu de telle sorte que les objets sont présentés selon l’angle sous lequel les verrait le public dans un hall d’exposition. Le succès fut immédiat, puis rapidement confirmé. Meubles en kit, meubles de designers, c’est la grande diffusion. Terence Conran y participe avec d’autres jeunes designers talentueux comme Gae Aulenti, Marc Held, Olivier Mourgue, Jean-Pierre Garrault. L’aventure durera presque 10 ans et se terminera en 1977.
Prisunic sera achetée en 1997 par l’enseigne Monoprix. Les magasins, pour certains largement déficitaires, sont démantelés et intégrés au réseau des magasins à l’enseigne Monoprix. La dissolution totale de la société est prononcée en 2002. Le dernier établissement à l’enseigne Prisunic ferme ses portes à Noisy-le-Sec en 2003.
Les meubles Prisunic des années 70 ne cessent de prendre de la valeur (comptez par exemple un minimum de 250 euros pour un meuble chiffonnier bleu canard à quatre tiroirs signé Marc Held).
Ikea (Créé en 1943) :
L’acronyme Ikea a été créé à partir des premières lettres du nom du fondateur de la marque (Ingvar Kamprad), du nom de la ferme de ses parents (Elmtaryd) et du nom de son village (Agunnaryd). Ingvar Kamprad, fils de paysans, a la fibre du commerce très jeune. Le porte-à-porte étant une méthode de vente peu adaptée à ses ambitions, Kamprad décide de faire de la réclame dans la presse locale et de travailler avec un catalogue de vente par correspondance en 1945.
Le concept de Ikea repose sur le libre-service de la grande distribution et sur le meuble en kit, emballé depuis 1956 dans un « paquet plat », moins cher à produire et à transporter et plus simple pour le client à rapporter lui-même à son domicile. Cette chasse aux coûts est synthétisée dans le Testament d’un négociant en meubles écrit par Kamprad et remis à tous les nouveaux employés. Les produits sont présentés dans un catalogue distribué à 220 millions d’exemplaires. Il s’agit du troisième ouvrage le plus publié au monde après la Bible et le Petit Livre rouge. Le premier catalogue Ikea est publié en 1951. Distribué à 250.000 exemplaires, ce n’est alors qu’une insertion publicitaire de neuf pages dans un journal suédois. Les légendes des photos sont écrites par le fondateur lui-même. Dans le magasin, les clients se voient imposer un parcours, qui les oblige à découvrir l’ensemble des produits mis en situation pour susciter l’achat impulsif.
Afin de réduire les coûts, Kamprad décide en 1960 de faire fabriquer ses meubles en Pologne. Les fonctions stratégiques de la multinationale sont en revanche toujours à Älmhult (Suède). Ikea compte aujourd’hui 1220 fournisseurs dans cinquante-cinq pays, dont un tiers environ se trouvent en Asie. En 2001, la Chine devient le premier fournisseur de l’enseigne avec 18 % des produits du groupe. La marque peut pourtant avancer le « Design and Quality – Ikea of Sweden » puisque les meubles sont dessinés en Suède, où 7 % d’entre eux sont fabriqués.
L’image de la marque d’une offre à bas prix s’appuie sur la communication autour d’un fondateur dépeint comme économe et simple, qui s’allie à un design suédois au bois blond et aux lignes épurées. L’identité suédoise d’Ikea est affirmée dans la reprise des couleurs nationales par le logo, par les noms des produits, composés d’un seul mot et pour la plupart d’origine suédoise, danoise, finnoise ou norvégienne. Bien qu’il y ait des exceptions, il existe un système de nomenclature reposant sur des noms de lieux ou fleuves scandinaves par exemple. Duktig (« bien élevé ») est une ligne de jouets pour enfants, Oslo est le nom d’un lit, Jerker (un nom suédois masculin) est un bureau, Kassett est un meuble de rangement. Une variété de meubles de bureaux est nommée Effektiv (« efficace »). Skärpt (« aiguisé ») est une ligne de couteaux de cuisine.
Avec la mode du vintage, la cote de certain meubles Ikea s’envole : Le fauteuil Ake des années 50 dessinée par le Danois Philip Arctander peut dépasser les 10.000 euros. La Collection 1700 crée par Lars Sjöberg entre 1991 et 1997 peut atteindre 3000 euros pour la série de chaises et 2500 euros pour la table Bergslagen. Plus abordables, les fauteuils grillagés Oti dessinés par Jorgen Grammelgaard dans les années 80 peuvent se trouver à 300 euros.
Il y a eu un temps entre le début des années 1950 et le milieu des années 1960 où chaque roman de Clifford Simak semblait capturer la vraie magie de la science-fiction, véhiculant souvent des idées très complexes avec une lisibilité et un flux étonnants, et affichant une délicieuse expertise dans la capture d’humeur et l’atmosphère – le plus souvent celle du Midwest américain, qui semblait être le territoire naturel de Simak.
La plupart des romans de l’âge d’or de Simak sont pleins d’action et de drame. Dans ce contexte, “Au carrefour des étoiles” (1963), souvent considéré comme le meilleur d’entre eux, est le plus étrange. Pour environ la première moitié du livre, l’intrigue est pratiquement statique, le souci étant de mettre en place et d’explorer la situation dans laquelle l’action de la deuxième moitié pourra se dérouler. Bien sûr, cela pourrait s’avérer soporifique et pourtant, malgré son manque apparent d’évènements, “Au carrefour des étoiles” est passionnant. En effet dans ce livre, Simak nous offre un opéra spatial d’envergure galactique dans les limites restreintes d’une ferme solitaire du Wisconsin.
L’auteur :
Clifford Donald Simak (1904-1988), fils d’un immigré tchèque, passe son enfance dans la ferme de son père. Après ses études à l’Université du Wisconsin-Madison, il commence à travailler comme instituteur, toujours dans le Wisconsin. Il collabore aussi à plusieurs journaux locaux et il envoie, en 1931, sa première nouvelle de science-fiction “Cubes of Ganymede”, à “Amazing Stories”.
Entre 1938 et 1943, Simak publie dans “Astounding Stories”, rebaptisé “Astounding Science Fiction”, une vingtaine de nouvelles dont “City”, premier texte de son plus célèbre roman “Demain les chiens” (1952). Puis, il s’éloigne petit à petit de ce magazine pour se rapprocher d’un autre, “Galaxy Science Fiction”, dans lequel il publie près d’une soixantaine de nouvelles entre 1941 et 1948.
Sa carrière de journaliste progresse aussi, puisqu’il devient directeur de l’information au Minneapolis Star en 1949 et coordinateur du Minneapolis Tribune’s Science Reading Series à partir de 1961. Il faut attendre le début des années 1950 pour voir Simak se consacrer en priorité à l’écriture de romans dont certains sont considérés par beaucoup d’admirateurs comme ses chefs-d’œuvre : “Dans le torrent des siècles” (1951) et “Chaîne autour du soleil” (1954). “Au carrefour des étoiles” (1963) est récompensé par le prix Hugo en 1964.
En 1962, Simak abandonne son poste de directeur de l’information au Minneapolis Star pour devenir journaliste scientifique. Il sera récompensé par la Minnesota Academy of Science Award en 1967 pour son travail dans la vulgarisation scientifique. Il prend sa retraite du journalisme en 1976 et continue à écrire au rythme d’environ un livre par an. Il reçoit cette année-là, le Grand Master Award de la SFWA pour l’ensemble de son œuvre. Clifford Simak a exploré de nombreux thèmes du genre au cours de sa carrière : voyages dans le temps, mondes parallèles, mutants, et a même écrit quelques textes de fantasy: “La Réserve des lutins” (1968), “Le Pèlerinage enchanté” (1975).
Le roman :
“Au carrefour des étoiles” est l’histoire d’Enoch Wallace, un homme solitaire vivant reclus dans une vieille maison du sud-ouest du Wisconsin. L’histoire est contemporaine de la date de publication du roman (au début des années 60). Il se lie avec certains voisins, notamment avec Winslowe Grant, le facteur, et une jeune fille sourde et muette dénommée Lucy Fisher.
Cependant, Claude Lewis, un agent de la CIA, découvre que d’après les registres de l’état civil, Enoch Wallace, d’apparence trentenaire, aurait en réalité 124 ans, et serait donc le dernier survivant de la guerre civile.
Nous apprenons bientôt le secret d’Enoch : de retour de la Guerre de Sécession, il a été choisi par un extraterrestre dénommé Ulysse pour devenir le gardien de la station stellaire récemment créée sur Terre, un des relais que la Confédération Galactique utilise pour permettre aux habitants de la Galaxie de voyager plus rapidement. Depuis un siècle, dans sa vieille bâtisse, il s’est donc transformé en “aiguilleur de l’espace”, ce qui lui permet de rencontrer de nombreux êtres étranges avec lesquels parfois il s’est lié d’amitié, mais aussi de se retrouver à l’abri du temps et d’échapper ainsi au vieillissement. Mais la Terre n’est pas encore prête pour l’adhésion à la confraternité des races galactiques, c’est pour cela qu’Enoch doit garder l’existence de sa station secrète. Après s’être coupé de ses congénères, Enoch consacre son temps à écrire un journal intime, sorte de cahier de rencontres où il consigne toutes ses observations sur les différentes créatures qu’il croise dans sa station.
Il a également appris une science extra-terrestre, qui l’a convaincu, à son grand désespoir, que la Terre se dirige vers une guerre nucléaire désastreuse. Si elle ne détruit pas forcément toute vie humaine, elle retardera certainement toute entrée possible de la Terre dans l’union galactique de plusieurs siècles.
Au fil du livre, plusieurs menaces différentes se concrétisent : la CIA mène son enquête sur l’anomalie temporelle créée par le champ de la station et, dans la Galaxie, le Talisman, un artefact garant de la paix entre les peuples, est dérobé, ce qui menace de plonger la Confédération Galactique dans le chaos. Enfin, le père de de son amie Lucy qui a d’étranges pouvoirs menace de lui rendre la vie difficile.
Enoch est donc confronté à une crise dans laquelle s’offrent à lui plusieurs choix désagréables : abandonner la Terre et sa station d’acheminement ; ou abandonner la maison et retourner dans la société terrestre, perdant ainsi sa connexion avec ses amis extraterrestres ; ou peut-être même demander à la société galactique de prendre des mesures drastiques concernant la limitation des capacité de l’humain à faire la guerre…
Extraits du livre :
Extrait N°1 :
« Enoch remit son mouchoir en poche et, le voyageur sur ses pas, regagna le perron. Tous deux s’assirent sur les marches.
– Vous devez venir de très loin, lança Enoch avec une curiosité discrète.
– De très loin, en effet. Je suis à une sacrée distance de chez moi.
– Et vous avez encore une longue route à faire ?
– Non, répondit l’étranger. Non, je crois que je suis arrivé là où il fallait que j’aille.
– Vous voulez dire…
Mais Enoch laissa sa phrase en suspens.
L’étranger reprit :
– Je veux dire : ici. Sur ces marches. J’étais à la recherche d’un homme et je pense que vous êtes cet homme. Je ne connaissais pas son nom, j’ignorais où je le rencontrerais, mais je savais que je le trouverais un jour ou l’autre. Et voilà qui est fait.
– Moi ? fit Enoch, sidéré. C’est moi que vous cherchiez ? Mais pourquoi ?
– Il fallait que cet homme présentât diverses caractéristiques. Entre autres, qu’il eût tourné ses regards vers les étoiles et se fût posé des questions à leur sujet.
– Cela m’est effectivement arrivé, dit Enoch. Bien souvent, bivouaquant dans les champs, enroulé dans ma couverture, j’ai regardé les étoiles en me demandant ce qu’elles étaient, comment il se fait qu’elles se trouvent là-haut et, surtout, pourquoi. J’ai entendu dire que chacune est un soleil semblable à celui qui brille sur la Terre. Mais je n’en sais rien et je suppose que personne ne sait grand chose à ce sujet…
– Il y a des gens qui savent.
– Vous, peut-être ? fit Enoch d’un ton légèrement railleur car l’inconnu n’avait pas l’air d’un homme qui eût des lumières particulières.
– Oui, répondit l’étranger. Quoique je n’en sache pas autant que beaucoup d’autres.
– Je me suis parfois demandé si, pour autant que les étoiles sont des soleils, il ne pourrait pas exister d’autres planètes. Et d’autres gens, aussi.
(…)
– Le croyez-vous ? demanda l’étranger.
– Ce n’était qu’une idée en l’air.
– Pas si en l’air que cela. Il existe d’autres planètes. Il existe d’autres gens. Je suis l’un d’eux. »
Extrait N°2 :
“- Nous voyageons d’étoile en étoile. Plus vite que la pensée. Pour cela, nous nous servons de ce que vous appelleriez des machines. Mais ce ne sont pas des machines. En tous cas, pas dans le sens où vous l’entendez.
– Je suis désolé, fit Enoch avec gène, mais cela me paraît tellement invraisemblable…
– Vous vous rappelez lorsque la voie ferrée a été installée à Melville ?
– Oui. J’étais tout gosse.
– Eh bien, admettez que c’est simplement une autre vois ferrée. La Terre n’est qu’une ville et cette maison sera la gare de ce nouveau chemin de fer. Un chemin de fer d’une nature spéciale. La seule différence sera que tout le monde sur Terre, vous excepté, ignorera l’existence de cette ligne. Ce ne sera d’ailleurs qu’un gîte d’étape, une simple plaque tournante. Aucun Terrien ne pourra acheter un billet à cette gare. “
Extrait N°3 :
« Si seulement je pouvais lui apprendre la science pasimologique des Galactiques ! songea Wallace. Alors, nous pourrions parler, elle et moi, presque aussi aisément que des humains échangeant un flot de paroles. Avec du temps, ce pourrait être faisable. Le langage par signes des Galactiques était si naturel et si logique que ce devait être un mode d’expression quasi instinctif une fois qu’on en avait assimilé les principes de base.
D’ailleurs, le langage par signes existait sur Terre depuis les origines des temps. Seulement, dans le meilleur des cas, ce n’était qu’une béquille permettant à l’homme de marcher en claudiquant, mais pas de courir. Alors que le langage galactique, mis au point pendant des millénaires par une foule d’êtres différents, était une véritable langue. Fignolée, polie et repolie, et qui, désormais, constituait un outil de communication à valeur universelle.
Et c’était aussi un instrument indispensable car la galaxie était une tour de Babel. La pasimologie elle-même ne parvenait pas à surmonter tous les obstacles : dans certains cas, elle ne réussissait même pas à assurer un minimum d’échange d’informations élémentaires. C’est qu’il n’y avait pas simplement le problème des langues parlées (on en comptait trois millions) ; il y avait aussi celui des langues ne reposant pas sur les lois de l’acoustique, leurs usagers appartenant à des races qui ignoraient ce qu’était le son. De quelle utilité, en effet, pouvait être le son pour des races utilisant les infra-sons, inaudibles à toute autre ? Bien sûr, il y avait la télépathie mais, pour une race de télépathes, il s’en trouvait mille qui avaient un blocage télépathique. Beaucoup employaient un système de signes, d’autres des symboles écrits ou des pictogrammes – certaines créatures possédaient même une sorte de tableau noir chimique incorporé à leur structure physiologique.
Sans oublier cette espèce sourde et muette, originaire de mystérieuses étoiles des confins de la galaxie, dont le langage était peut-être le plus complexe de l’univers tout entier : c’était un code de signaux véhiculés par le système nerveux. »